Partir, revenir… et transmettre

Éline O. et Mahieu Ramanitra, qui ont animé à deux voix un module sur «La gestion des conflits en milieu interculturel» lors de la session de formation des envoyés du Défap début juillet 2019, sont eux-mêmes d’anciens envoyés. Ils témoignent de ce qui les a poussés à devenir à leur tour formateurs.
Éline O. et Mahieu Ramanitra lors de la session 2019 de la formation des envoyés du Défap © Défap

 

Éline O. est partie en Égypte en 2014 avec le Défap et l’ACO (Action Chrétienne en Orient). Mahieu Ramanitra, pour sa part, a été envoyé à Madagascar au cours de l’année 2017-2018. Tous deux étaient chargés de missions d’enseignement. Des expériences dont ils reconnaissent l’un comme l’autre aujourd’hui qu’elles ont fortement modifié leur vision du monde, et durablement infléchi leur parcours de vie. À son retour d’Égypte, Éline O. s’est ainsi orientée vers une formation en médiation socioreligieuse, et elle a rejoint la Commission Échanges de Personnes (CEP), chargée au Défap du processus de recrutement des futurs envoyés. Des préoccupations que l’on retrouve chez Mahieu Ramanitra, qui, parti à la recherche de ses racines familiales à Madagascar, a été amené à s’interroger sur la violence dans les relations interculturelles, et s’est intéressé à la CNV (Communication Non-Violente)… Après être intervenus tous deux lors de l’Assemblée Générale du Défap, ils ont animé à deux voix un module sur «La gestion des conflits en milieu interculturel» au cours de la session 2019 de formation des envoyés.

 

Après votre expérience à l’étranger en tant qu’envoyés du Défap, qu’est-ce qui vous a motivés à y revenir comme formateurs ?

Mahieu Ramanitra : Il y a là pour nous une dimension de restitution, qui va au-delà du rapport de mission, au-delà de tout ce que nous avons pu laisser comme notes ou observations au profit des volontaires qui devaient nous succéder. Cette période de formation, nous sommes très conscients de l’importance qu’elle a pour les futurs envoyés. Et nous voulions pouvoir apporter notre pierre à l’édifice… Je me souviens que j’avais été particulièrement frappé par ce module sur la gestion des conflits… C’est sans doute dès ce moment-là qu’une première graine a été semée chez moi, qui a influé sur mes centres d’intérêt. Ensuite, au cours de ma mission, j’ai rencontré d’autres envoyés du Défap qui ont orienté mes réflexions. Ce n’est pas un hasard si c’est un autre volontaire qui m’a fait découvrir la Communication Non-Violente…

Éline O. : Ce qui m’avait plutôt marquée, c’était le module sur l’interculturalité : on y abordait des questions concernant les valeurs, les besoins, les différences d’intérêt en fonction des cultures. Pour moi, dès ce moment-là, je savais qu’il y avait une porte qui s’était ouverte, et que j’aurais besoin de creuser davantage dans ce domaine. Mon expérience en Égypte n’a fait que m’en convaincre davantage. Et c’était logique d’en faire bénéficier les futurs envoyés…

Comment s’est passé ce retour au Défap ?

Éline O. : Depuis mon retour d’Égypte, je suis passée tous les ans au Défap lors des périodes de formation des envoyés. Il y avait chez moi l’envie de passer le flambeau, de voir comment évoluait la situation sur mon lieu de mission… Et puis, on retrouve au Défap une ambiance familiale dans laquelle je me sens bien. Aussi, quand j’ai reçu cette proposition de participer à un module de formation, la réponse était pour moi évidente : c’était oui, bien sûr !

Mahieu Ramanitra : Pour moi aussi, c’est quelque chose qui me semblait aller de soi : j’ai l’impression, en fait, de ne jamais vraiment m’être éloigné du Défap… Il y a eu la session retour des envoyés à laquelle j’ai participé en octobre 2018 ; ensuite, les contacts ont été réguliers au fil des mois… Ce projet de formation a commencé à mûrir très tôt. Pour moi, c’est une forme de don et de contre-don : si je peux revenir ici pour transmettre, c’est parce que j’ai moi-même beaucoup reçu.

Éline O. : Il y a eu pour nous deux un moment très significatif : lorsque nous avons été invités, Mahieu et moi, à témoigner lors de l’Assemblée Générale du Défap. Nous avons senti que notre expérience d’envoyés était vraiment entendue, valorisée, voire même interpellante. Et qu’au-delà de ce que nous avons vécu, nous portions un peu le témoignage de tous les envoyés…

Éline O. et Mahieu Ramanitra lors de la session 2019 de la formation des envoyés du Défap © Défap

 

Comment avez-vous conçu ce module de formation ?

Éline O. : Nous l’avons pensé comme une combinaison d’outils à fournir, et d’interactions avec les envoyés. Du coup, nous avons alterné les séquences d’apports théoriques et les moments d’animation de groupe. Et nous avons chacun un apport spécifique, tout en étant capables d’intervenir sur la partie de l’autre : Mahieu a beaucoup travaillé sur la Communication Non-Violente, sur l’aspect prévention et gestion des conflits ; je m’attache davantage aux modes alternatifs de résolution des conflits, en faisant intervenir des tiers.

Mahieu Ramanitra : Nous intervenons, non pas seulement en tant qu’experts, mais surtout parce que nous avons vécu ce que les futurs envoyés seront amenés à vivre. Et même si nous ne citons pas d’exemples personnels, il est évident que notre expérience a fortement influencé notre réflexion. Nous n’avons pas la prétention d’apporter des connaissances que les autres vont devoir mettre en pratique simplement parce que notre savoir fait foi ; nous intervenons autant comme animateurs que comme formateurs.