Madagascar : nourrir, accueillir, accompagner

Après un tour d’horizon des enjeux et des conditions de la présidentielle malgache, présentation d’un des projets soutenus par le Défap : l’accueil périscolaire des sœurs de Mamré, à Tananarive. Il fait partie des projets tournant autour de l’éducation où travaillent des envoyés du Service protestant de mission. Le point à travers cet article du pasteur Enno Strobel, responsable du service mission de l’UEPAL (Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine), publié dans le dernier numéro de L’Église missionnaire.

Envoyée du Défap à l’accueil périscolaire des sœurs de Mamré, à Tananarive © Enno Strobel pour L’Église missionnaire

 

Ambavahadimitafo, quartier sur une des 12 collines de Tananarive, capitale de Madagascar. Situé à proximité du palais de la reine, célèbre emblème de la ville, il y a de l’ombre et de la lumière : une population plutôt «bourgeoise» vivant à côté de personnes extrêmement pauvres.

Il y a une vingtaine d’années, une institutrice de l’école primaire publique du quartier vient voir ses voisines, les sœurs de Mamré, communauté de diaconesses proches de la FJKM (Église réformée de Madagascar). Depuis un certain temps déjà, elle avait remarqué que les enfants avaient l’air de plus en plus fatigués, comme éteints, et ceci pendant les cours et à la récréation. Suite à cela, elle va visiter les familles des enfants, qu’elle trouve dans des situations désastreuses. Elle découvre que bon nombre d’enfants n’a pas un repas par jour, que 7 ou 8 personnes vivent dans des espèces de baraques de 3m². Que faire ?

La première nécessité : nourrir les enfants, pour qu’ils aient la force d’être réceptifs à l’école. L’amorce d’une cantine scolaire est vite donnée. Les sœurs s’engagent à organiser les repas. La paroisse FJKM les soutient, entre autres, en leur mettant à disposition une maison. Aujourd’hui, une centaine d’enfants reçoivent un repas chaud par jour. Ils sont bien plus à en avoir besoin. Pourtant, c’est bien plus qu’une goutte d’eau dans l’océan !

Investir dans l’éducation pour un avenir meilleur

Pour aller plus loin :

Or, la nourriture seule ne suffit pas pour sortir de l’impasse d’une couche sociale vivant aux limites existentielles en permanence. L’appartenance à cette couche est quasiment bétonnée par le système d’éducation nationale : l’enseignement primaire se fait en malgache, le secondaire en français, sans parler des études supérieures. Mais qui maîtrise suffisamment la langue française pour réussir les examens exigeants donnant accès au secondaire ? Les familles aisées, lettrées. Celles qui se promènent en 4×4. Pas les enfants du chauffeur de taxi qui conduit une 4L des années 70, qui tombe régulièrement en panne d’essence, parce qu’il ne peut acheter que 2-3 litres de carburant à la fois avec ce qu’il a dans sa caisse (1).

Pour cela, la cantine scolaire devient accueil périscolaire. Deux jeunes services civiques français envoyés par le Défap y sont engagés, à côté d’un animateur malgache (ancien bénéficiaire de la structure) et du cuisinier : aide aux devoirs, améliorer le niveau de français de manière ludique, un peu de loisirs et de distractions, avant de rentrer «à la maison».

Madagascar est un des pays les plus pauvres du monde. La détresse est criante, où que vous alliez. Comme dans beaucoup d’autres pays de l’hémisphère sud, ce ne sont pas les moyens qui manquent (terres précieuses, pétrole etc.), mais ils sont dévorés par la corruption et l’enrichissement des dirigeants politiques et économiques du Nord et du Sud. Il ne reste plus grand-chose pour le peuple. Son avenir lui est confisqué. Pourquoi il ne se lève pas pour réclamer ses droits et ses biens ? Parce que la base de toute capacité de résistance à ce niveau est l’éducation, la formation, le savoir nécessaire qui donne l’estime de soi nécessaire pour montrer du doigt l’injustice, pour se défendre. Investir dans l’éducation et le bien-être de ces enfants est investir dans un avenir meilleur. Goutte à goutte on remplit la cuve !

L’UEPAL soutient la structure aussi via La Cause (projet n° 2018.17 du «carnet de solidarité»).

Enno Strobel pour L’Église missionnaire

1) Le revenu moyen à Madagascar est de 39 euros, le SMIC s’élève à 20 euros. Un litre de carburant coûte 1 euro.

Retrouvez dans la vidéo ci-dessous une présentation de Madagascar, des liens existant aujourd’hui avec les Églises protestantes de France, et des actions du Défap.